
Les cheffes d’entreprise et jeunes entrepreneures de Lomé (Togo) : des « superwomen » de la double journée de travail professionnel et domestique ?
Author(s) -
Charlotte Vampo
Publication year - 2018
Publication title -
enfances, familles, générations
Language(s) - French
Resource type - Journals
SCImago Journal Rank - 0.105
H-Index - 7
ISSN - 1708-6310
DOI - 10.7202/1051495ar
Subject(s) - political science , humanities , art
Cadre de la recherche : Le Togo, pays àforte tradition commerciale, présente un taux élevé d’activité des femmes.Celles-ci sont encouragées à entreprendre et disposent librement de leursrevenus. Parallèlement, elles ont la charge quasi intégrale du travaildomestique. Si la plupart d’entre elles sont cantonnées aux activitésinformelles, certaines cheffes d’entreprise ont réussi à se faire une place dansla capitale dans des secteurs émergents de l’économie formelle. L’enquête portesur ces archétypes de l’émancipation féminine par le travail, qui ont fait desétudes supérieures et qui sont dans des associations qui promeuventl’entrepreneuriat des femmes et leur empowerment . Objectifs : Cet article explore lamanière dont elles adhèrent à la division sexuelle du travail (DST)traditionnelle. Il questionne les ressources dont elles disposent pour gérerleur quotidien entre contraintes familiales et obligations professionnelles dansle but de discuter les reconfigurations dans les rôles genrés. Méthodologie : Pour ce faire, laréflexion s’appuie sur des terrains ethnographiques réalisés à Lomé au cours descinq dernières années. Une micro-analyse des rapports de genre est privilégiéedans le souci d’appréhender les itinéraires de réussite des entrepreneures dansune approche relationnelle. Le matériel empirique se compose d’entretiens,d’observations en entreprises et en dehors de celles-ci, de discussionsinformelles et d’un questionnaire sur la répartition des dépenses et des tâchesau quotidien. Résultats : Les résultats indiquent quela conciliation travail professionnel-travail domestique est considérée comme undevoir de femme mariée. La principale ressource dont disposent ces femmes pours’organiser est le transfert des charges domestiques sur d’autres femmes autantau domicile que dans l’entreprise. Conclusions : L’adhésion à la DST estdéterminée par la place occupée par le mariage dans la réussite et par desenjeux de reconnaissance sociale associés au rôle reproducteur des femmes. Lescheffes d’entreprise de Lomé ne pourraient pas être les superwomen qu’elles essayent d’être sans le recours à d’autres femmes.Contribution : L’accès des femmes à despostes à fortes responsabilités ne modifie pas complètement les rôles de genresi l’on se penche spécifiquement sur la division sexuelle du travail. Lareconfiguration des rapports de genre est partiellement dépendante de l’ empowerment économique des femmes. Toutefois, lanégociation sociale du statut de cheffe d’entreprise se fait dans latransgression des normes de genre mais surtout dans la perpétuation d’un ordreinégalitaire de genre qui accompagne paradoxalement les changements. Cet articlenous invite à reconsidérer l’ empowermentcomme un processus socio-politique à la fois individuel et collectif.