
Un baby-boom, des baby-boomeuses ? Trajectoires professionnelles des femmes françaises issues du baby-boom
Author(s) -
Céline Clément,
Catherine Bonvalet
Publication year - 2016
Publication title -
enfances, familles, générations
Language(s) - French
Resource type - Journals
SCImago Journal Rank - 0.105
H-Index - 7
ISSN - 1708-6310
DOI - 10.7202/1038118ar
Subject(s) - humanities , political science , philosophy , art
Dans le schéma classique des années 1960, la vie en dehors de lafamille était exclusivement réservée aux hommes, alors que les femmes étaientconsidérées comme les « reines du logis ». Élevées selon ce modèle, lesgénérations nées après-guerre vont pourtant s’en affranchir et initier descomportements plus autonomes en élaborant de nouvelles formes de vie au sein ducouple et de la famille, mais aussi en dehors de cette sphère privée. Ainsi, àpartir du moment où les femmes ont reçu une éducation, ont eu la possibilité demaîtriser leur fécondité en choisissant le moment de l’arrivée et la taille deleur descendance finale, leurs trajectoires se sont diversifiées, notamment parle biais de leur activité professionnelle, comme en témoigne leur insertionmassive et durable dans le marché de l’emploi à partir de 1960. Il s’agit alorsd’une véritable rupture sociologique, d’une transformation radicale du rapport àl’emploi, avec le passage d’un modèle féminin d’inactivité à celui d’uneactivité discontinue, lequel va permettre l’émergence du modèle que nousconnaissons aujourd’hui, celui de la continuité et du cumul (Maruani, 2000). Or,si les générations du baby-boom sont souvent considérées comme les initiatricesde ce dernier modèle, il en coexiste plusieurs à cette période.L’objet de cet article est de décrire, dans le temps long, cesdifférents modèles d’activité à partir de 32 récits de vie réalisés à Paris eten région parisienne auprès de femmes issues de la première génération dubaby-boom, c’est-à-dire nées entre 1945 et 1954. Cela permettra de s’interrogersur ces profils d’activité qui se construisent depuis l’enfance notamment selonl’empreinte maternelle (Battagliola, 1987), jusqu’à la fin de vie active, enpassant par les modes d’entrée dans la vie adulte, source de différenciationsociale des trajectoires féminines (Blöss et al.,1996), et d’en établir une typologie (tout en sachant que ces modèles sont loind’être statiques et s’avèrent poreux, les femmes pouvant passer d’un modèle à unautre, notamment lorsqu’elles se séparent). Car ces évolutions ne se réalisentpas pour toutes, ni au même moment du cycle de vie, ce qui induit unehétérogénéité des parcours, mais aussi différentes visions de ce que doit êtrela place des femmes au sein de la famille et de la société, ces différentsmodèles structurant fortement l’organisation familiale ainsi queles représentations de la famille, et influençant leurs trajectoires– notammentconjugales.In the normal scheme of things in the 1960s, life outside thefamily was reserved for men only, while women were considered “queens of thehousehold.” Though raised according to this model, generations of women bornpost-war would nevertheless free themselves of it and gain more autonomy bydeveloping new lifestyles both within their relationships and families but alsooutside of these private spheres. Once women were able to receive an educationand take control of their fertility—choosing when and how many children tohave—their life trajectories began to diversify, in particular in terms of theircareers, as evidenced by their large-scale and permanent entrance into the jobmarket starting in 1960. This was a major sociological change at the time and aradical transformation of employment status, with women moving from staying athome, to working some of the time, and leading to the model we have today, thatof full-time employment and even holding multiple jobs (Maruani, 2000). Yetwhile the baby-boom generations are often viewed as the initiators of thislatter model, a number of different employment models currently coexist. The goal of this article is to describe, over the long term,these various employment models by way of 32 life histories of women from thefirst-generation of baby boomers (i.e., born between 1945 and 1954) taken inParis and the surrounding region. These activity profiles constructed startingfrom childhood—in particular stemming from maternal imprinting (Battagliola,1987), to modes of entry into adulthood, the root of social differentiation andfemale trajectories (Blöss et al., 1996), to the end oftheir working lives—can then be explored and used to establish a typology(knowing full well that such models are both highly changeable and permeable,since women may move from one model to another, especially if they separate).Such changes do not occur for everyone or at the same moment in life, whichresults in a heterogeneity of career paths but also in different visions women’splace in the family and in society, since these different models greatlyinfluence how families are organized and represented, and they influence women’strajectories, especially in terms of their conjugal relationships