
Le secret de Jean-Joseph Surin ou l’expérience de l’impensable damnation
Author(s) -
Sophie Houdard
Publication year - 2009
Publication title -
les dossiers du grihl
Language(s) - English
Resource type - Journals
ISSN - 1958-9247
DOI - 10.4000/dossiersgrihl.3675
Subject(s) - philosophy , humanities , damnation , ethnology , theology , history
Le terme de mystique désigne le contraire du « fait » religieux, de ce qui est observable et positif, en sorte que l’on pourrait réduire la mystique à une tradition occulte qu’il s’agirait de découvrir et de communiquer ; dans ce cas, le secret protège-t-il les voies d’une initiation ou dissimule-t-il une déviation que la communauté ne peut officiellemment tolérer ? qu’est-ce qui distingue un mystique d’un fou, d’un enthousiaste ? comment produire une tradition autorisée de manière à justifier son existence « à côté » du discours de l’exégèse ? Le jésuite français Jean-Joseph Surin (1600-1665) nous servira de cas exemplaire pour répondre à ces questions. On observera la manière avec laquelle ne voulant pas se départir de l’obéissance à la Compagnie de Jésus, il trouve pourtant les moyens de diffuser sa science mystique, en dépit des censures des autorités. C’est cette contradiction dont on regardera les effets : la légitimité du discours dépendant, selon Surin, de l’Église et d’aucun autre point de vue, quelle est alors la signification « véritable » de la damnation que Surin prétend expérimenter, en dehors de toute vérité théologique ? The word mysticism means the opposite of religious "fact". It means the opposite of what is observable and positive, so that we could reduce mysticism to an occult tradition that we are able to discover and communicate. But in this case, does secrecy protect the tracks of an initiation or does it conceal, or dissimulate, a deviation, a drift, that the community cannot tolerate officially? what distinguishes a mystic of a madman, of an enthusiast? how to produce a sort of authorized tradition in order to justify its existence "beside" the discourses of exegesis? The French Jesuit Jean-Joseph Surin (1600-1665) will serve as a model case to answer these questions. We will observe the manner in which, unwilling to break away with his obedience to the Society of Jesus, he finds some ways to disseminate his mystical science, despite the censorship authorities. We will describe the effects of this assumed contradiction: if the legitimacy of discourse depends, according to Surin, on the Church only, and on none other point of view, what is the « true » meaning, then, of this damnation that Surin, out of any theological « truth », claims to experience