
Jeu et désespoir : l’écriture chez Nietzsche et Kafka
Author(s) -
Anne Duclos
Publication year - 2019
Publication title -
studia romanica et anglica zagrabiensia
Language(s) - French
Resource type - Journals
eISSN - 1849-1421
pISSN - 0039-3339
DOI - 10.17234/sraz.64.4
Subject(s) - humanities , philosophy , art
Chez Nietzsche comme chez Kafka, l’écriture est un acte et une expérience avant d’être une production linguistique et conceptuelle. Le parallèle entre les deux auteurs se justifie par le fait que chacun est comme en miroir de l’autre, exprimant un même rapport à l’écriture mais toujours en négatif l’un de l’autre. Ainsi, l’écriture philosophique de Nietzsche est remarquable par son caractère littéraire, quand l’écriture littéraire de Kafka est d’une abstraction toute philosophique. Travail du corps autant que de la pensée, chez les deux auteurs, l’écriture se joue selon trois mouvements, celui de la coïncidence, celui de la distance et celui de la dissolution. Le paradoxe cruel est que l’écriture implique à la fois la coïncidence et la distance avec soi-même. Ce sont précisément ces mouvements parfois antithétiques qui expliquent que l’acte d’écrire soit pour Nietzsche le lieu essentiel de l’expérience philosophique, non pas la mise en forme d’idées et de concepts mais leur manifestation vivante. Dans ce rapport complexe entre l’écriture et la pensée, la pensée prend forme à la fois dans la langue et malgré la langue, ambiguïté qui se retrouve dans le statut qu’occupe la métaphore, point de départ pour Nietzsche et contre-modèle pour Kafka.