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Le lecteur en procès: Analyse rhétorique du modèle judiciaire dans Les confessions de Rousseau
Author(s) -
Brissette Pascal
Publication year - 2002
Publication title -
orbis litterarum
Language(s) - French
Resource type - Journals
SCImago Journal Rank - 0.109
H-Index - 8
eISSN - 1600-0730
pISSN - 0105-7510
DOI - 10.1034/j.1600-0730.2002.570302.x
Subject(s) - humanities , philosophy , art
Dès l'ouverture des Confessions , le lecteur est intégréà un procès qui oppose Rousseau à l'univers. Sous l'œil approbateur de l'« Être éternel », le narrateur se déclare essentiellement bon et sincère. Mais qu'en est‐il du lecteur, altérité construite à travers le discours qui occupe une position ambiguë, à la fois témoin et juge? Cet article cherche à montrer que les pages inaugurales des Confessions placent le lecteur dans une position inconfortable: est‐il ami ou ennemi, témoin bienveillant ou accusateur? Notre hypothèse est que, au contraire de ce que laisse croire le titre, ce n'est pas tant Rousseau qui est mis en procès, que le lecteur lui‐même, engagéà se « dévoiler », à avouer sa bienveillance ou son inimitiéà l'égard d'un narrateur ontologiquement innocent. L'analyse s'attachera à dégager un modèle judiciaire à trois instances (juge, accusé, accusateurs) et à mettre en lumière le glissement qui se produit dans la distribution initiale, le confessé se disculpant d'emblée par sa bonne foi et mettant en procès ses accusateurs. Nous examinerons plus particulièrement, à travers des épisodes comme celui du « vol du ruban », les schèmes argumentatifs et les topoï sur lesquels repose leur pouvoir persuasif.