L'Analyse de la Question des Déplacés du Conflit Casamançais. Trois Décennies Après

Résumé Région riche d'une grande diversité ethnique et culturelle qui fait d'elle la région la plus sénégalaise du pays, la Casamance est pourtant traversée par un conflit de plus de trois décennies qui oppose l'Etat du Sénégal au Mouvement Démocratique des Forces de la Casamance (MFDC). A l'heure actuelle, différents accords sont signés entre les belligérants et des efforts soutenus pour la paix sont engagés. Le développement de ce processus a entrainé le retour de certaines populations dans leur village d'origine et parallèlement on observe aussi une implication forte des ONG et autres structures étatiques qui mettent en place des dispositifs visant à accompagner et ou à faciliter le retour et la réinsertion des déplacés du conflit de la Casamance. Les mécanismes mis en place pour faciliter le retour des déplacés sont‐ils pour autant fonctionnels? En tout cas, on observe après plusieurs années d'activités de ces structures, que la lancinante question des déplacées du conflit casamançais est toujours d'actualité. Ces structures qui travaillent pour le retour des populations se contentent de créer les conditions d'un retour par la mise en place des infrastructures communautaires de base alors qu'il y a d'autres obstacles à franchir tels que l'absence d'accord entre l'Etat et le MFDC ou encore l'arrêt du déminage. On observe aussi la non implication des populations déplacées lors des différentes rencontres de négociations entre les belligérants et les facilitateurs. Ces constats constituent autant de limites objectives au retour des populations déplacées du conflit casamançais. On se pose alors la question des déterminants du retour en ces termes: quels sont les processus décisionnels qui dictent le retour des populations déplacées et des réfugiées vers leur lieu originel? La question cruciale des populations déplacées ont amené beaucoup d'observateurs à lier la fin du conflit casamançais au retour effectif des populations dans leur zone d'habitation traditionnelle. Ce retour est par ailleurs une condition sine qua none d'un développement de la Casamance, car sa réalisation est déjà une victoire de la Casamance sur elle‐même. Pour autant, les activités de dépollution des mines et autres engins de guerre doivent être la première entreprise à mener et ce sur toute l'étendue de la Casamance. En réalité, sans la dépollution de la Casamance, des milliers d'hectares ne seront pas mobilisables pour l'agriculture et aura pour conséquence la difficulté d'atteindre l'autosuffisance alimentaire si chère au Sénégal émergent. Il serait peut‐être exagéré d'affirmer que le MFDC a l'exclusivité des décisions de retour des déplacés, pour autant, un accord préalable donné par l'aile combattante serait une garantie sûre d'un retour durable, seule condition de développement des activités économiques rentables. Comprendre les processus sous‐jacents qui dictent le retour des déplacés serait riche d'enseignements et aiderait à mieux appréhender la manière la plus efficiente d'asseoir une dynamique de paix. L'éclairage de ces processus décisionnels permettra ainsi la mise en place d'un dispositif opérationnel et viable du retour de populations déplacées du conflit casamançais.