
Les musées de migration en France
Author(s) -
Dominique Poulot
Publication year - 2020
Publication title -
ethnologies
Language(s) - French
Resource type - Journals
eISSN - 1708-0401
pISSN - 1481-5974
DOI - 10.7202/1070472ar
Subject(s) - humanities , political science , art
Les musées en France, comme dans les autres pays, étaient traditionnellement au début de leur histoire consacrés à assurer la conservation, donc la permanence, de quelques œuvres d’art ou d’autres objets sur un territoire spécifique: ils illustraient la stabilité et la continuité de communautés plus ou moins imaginaires dont ces artefacts faisaient partie. C’est seulement au cours des dernières décennies du vingtième siècle que quelques musées d’histoire ou de société ont tenté d’exposer certains exemples d’immigrations : ce fut le cas du musée de Grenoble, à propos des communautés venues d’Italie, d’Arménie, d’Algérie, du Maroc. Mais le tournant à ce propos est la décision de créer un musée national d’histoire de l’immigration à Paris, sous la pression de communautés, d’historiens, et après une longue hésitation du pouvoir politique. Le choix d’installer l’établissement dans un palais de l’exposition coloniale de 1931, qui fournissait l’opportunité de réutiliser un monument historique, n’était pas heureux. L’ouverture elle-même intervint au moment du changement de la majorité politique au gouvernement, et enfin le musée fut envahi peu de temps après par des immigrés sans papiers, en protestation contre leurs conditions de travail. Le musée a eu depuis à lutter contre un ensemble de difficultés tenant au manque de budget, à sa relative marginalité dans la géographie touristique parisienne, et à un projet incertain, entre l’art contemporain, le tourisme et l’activisme social, ce qui ne lui a pas permis de s’installer vraiment dans le paysage muséal de la capitale. Une réforme complète de la muséographie est en cours, sous la direction d’un historien qui a récemment connu le succès avec une histoire mondiale de la France, et qui doit amener le musée à un statut international, au lieu de sacrifier aux vieilles querelles de l’identité nationale.