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Une des avancées les plus significatives pour l’étude de la variation historique est la proposition de cheminements (« pathways ») qui baliseraient l’évolution historique des paradigmes d’items. Son importance consiste à lier l’évolution historique (Traugott et Dasher 2002, van Gelderen 2011) à la variation typologique (Haspelmath 1997), mais aussi et à des principes d’acquisition. Les rapports entre cheminements d’évolution et psycholinguistique restent relativement spéculatifs. Pour autant, ces rapports offrent une perspective explicative qui mérite qu’on en examine les tenants et les aboutissants. La proposition selon laquelle un item se voit attribuer par les apprenants le statut le plus spécifié qui demeure compatible avec les données disponibles (Jäger 2010) implique que le changement linguistique soit unidirectionnel selon Willis (2011), reprenant sous un autre angle la proposition développée par Elizabeth Traugott (Traugott et Dasher 2002). La proposition d’une unidirectionalité du changement liée à des principes d’acquisition est évaluée dans ce travail. Cette évaluation est réalisée à partir d’une famille morphologique d’items déliquescents en moyen français, des expressions préfixées par n- que sont nesun, nul et nului. L’étude d’items déliquescents est intéressante parce qu’elle permet de mieux percevoir les mécanismes d’évolution que les phénomènes émergents, qui soulèvent de nombreuses incertitudes. Concrètement, si le changement linguistique est unidirectionnel, des items en voie de disparition devraient en être à la dernière valeur disponible sur un cheminement d’évolution, c’est-à-dire la négation pour les expressions qui nous intéressent. Or, beaucoup de négations semblent conserver (peut-être même voir réapparaître) des emplois à polarité négative (Martins 2000). Cette observation contredit une interprétation stricte d’une unidirectionnalité sous-tendue par l’acquisition, sauf à montrer que les emplois à polarité négative subsistant sont une sous-classe précise qui entretiendrait des rapports particuliers avec la négation. C’est ce que permet de supposer Giannakidou (2010) pour qui les emplois polarisés se conservant tardivement concerne une valeur forte de polarité,  ayant le plus d’affinités avec les emplois négatifs, ne constituant donc qu’une infraction mineure à la directionalité du changement. Il convient donc d’établir si des emplois à polarité négative demeurent pour les formes étudiées, et s’ils se limitent aux contextes les plus en lien avec la négation. Une dernière question que l’étude d’items déliquescents d’un même paradigme nous permet de poser est celle de la proportionnalité des changements dans une famille morphologique : les changements s’appliquent-ils également à tous les items du paradigme, ou chaque item connaît-il des développements autonomes sur le même cheminement ? Si les éléments s’accumulent en faveur de la seconde perspective (Déprez 2011, Labelle et Espinal 2013), la première permettrait de faire valoir le lien entre évolution et principes d’acquisition supposés s’appliquer également aux items. En somme, cette étude évalue la proposition d’une unidirectionalité du changement linguistique attribuée à des stratégies d’acquisition, et le fait en répondant aux questions suivantes : - l’évolution historique des items nesun, nul et nului est-elle unidirectionnelle ? - Le statut de négation d’items déliquescents s’accommode-t-il de la persistance ou de la recréation d’emplois polarisés ? - Les emplois polarisés subsistants appartiennent-elles aux contextes polarisés forts les plus en lien avec la négation ? - Le changement  est-il comparable pour tous les items d’un paradigme ? Les réponses apportées permettent d’envisager les causes des changements linguistiques

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L’unidirectionalité irréversible du changement linguistique comme conséquence de l’acquisition ? Le cas d’expressions négatives déliquescentes en français ancien