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Tout d'abord, je voudrais vous faire part de deux interrogations qui sont nées de la lecture assidue du programme (voir encadré). Première interrogation, c'est la démarche même des organisateurs qui proposent comme premier thème • L:écologie scientifique comme un fait • et comme second thème • Existe-t-il une écologie politique ? • Moi je dirais qu'en tant que politique, je m'étonne qu'on ne se soit pas posé la question de savoir s'il existe une écologie scientifique ou des écologies scientifiques. L:a priori dans la démarche, en tout cas, ne me paraît pas complètement dénuée d'ambiguïté. Cela dit, évidemment, je suis à la frontière de l'humour en faisant cette remarque. Simplement, j'ai bien noté, dans la présentation de ces Journées, que la crainte qui était exprimée, pas seulement en filigrane, était bien celle du brouillage de l'image et de la perte de crédibilité de l'écologie scientifique, d'une part par implication avec le politique mais aussi par déformation parascientifique. Soulignons qu'on ne peut pas se contenter de faire allusion à la matière ou aux affirmations hasardeuses, aux extrapolations réductrices et aux scénarios catastrophistes qui ont été véhiculés par certains écologistes politiques au tout début de leur histoire ; ça fait quand même bien longtemps qu'on ne parle plus de chutes d'avion sur les centrales nucléaires ou de courbes de croissance démographiques tellement alarmantes que nous aurions à nous battre, comme c'est décrit dans certaines bandes dessinées, pour de l'eau ou pour du blé. Même si la réalité dépasse parfois la fiction, il nous faut quand même reconnaître que le mouvement écologiste, dans son ensemble, a su éviter depuis des années les simplifications réductrices. Je pense tout particulièrement à la façon dont nous avons géré notre campagne contre les essais nucléaires français. Nous avons pris beaucoup de précautions pour ne pas accorder du crédit ou donner de l'audience à des éléments que nous ne pouvions pas vérifier sur le plan scientifique, notamment tout ce qui concernait les conditions de la dégradation éventuelle des atolls par les essais nucléaires ; contreexemple que j'ai envie de donner aussi, le travail remarquable de rigueur scientifique, qui a été fait par des écologistes politiques avec l'appui tacite de certains services de l'État pour démontrer les affirmations complètement fantaisistes des promoteurs du canal Rhin-Rhône à grand gabarit qui affichaient des perspectives de création d'emplois et des taux de rentabilité complètement farfelus. Je crois qu'il faut quand même ajouter d'autres éléments de perte de crédibilité de l'écologie scientifique au cours des dernières années. Je pense par exemple au risque de l'écologie profonde qui a été dénoncé par Luc Ferry avec des arrière-pensées qui ne sont évidemment pas les miennes. Cette écologie profonde s'est beaucoup développée dans certains pays, notamment l'Amérique du Nord, avec une mystique païenne qui relativise la place de l'être humain dans la nature ou qui exacerbe certains des rôles sociaux traditionnels ; je pense par exemple à l'exacerbation de solidarité au sein de la tribu qui constitue en fait un isolement par rapport au reste de la société ; je pense aussi à la façon dont les rôles féminins, masculins sont figés par les tenants de cette écologie profonde. Mais je mettrai sur le même plan une autre dérive aussi dangereuse dans ses excès que celle de l'écologie profonde, qui est celle de l'écologie scientiste telle qu'elle a pu par exemple s'exprimer dans l'appel de Heidelberg, avec des gens qui aspiraient à des activités scientifiques et qui considéraient finalement, comme s'il ne s'était rien passé depuis trente ans, qu'il existait une réponse scientifique à chacun des problèmes nouveaux qui nous étaient posés et que finalement tous ceux qui pensaient décliner les rapports de la science en les confrontant au filtre du réel, étaient des gens qui étaient suspects. Cela dit, j'en viens à mon sujet, celui que j'avais choisi il y a six mois à une époque où j'étais comme beaucoup, complètement exaspérée par ce que je sentais se dessiner dans mes relations avec les autres, à savoir une décrédibilisation du politique qui paraissait excessive et qui, en tout cas, donnait beaucoup d'espace aux plus démagogues, aux plus populistes et notamment aux extrémistes de droite, alors que l'engagement associatif est systématiquement survalorisé en faisant abstraction des problèmes qui sont effectivement posés. Est-ce que nous nous illusionnons sur le fait que la quasi-totalité des luttes locales contre le passage d'une bretelle d'autoroute, contre l'ouverture d'une station de tri ou de collecte des déchets sont autre chose que des luttes dont le point de départ est égoïste, ponctuel, dans le temps, dans l'espace et dans la tête des gens ? Est-ce que nous refusons de voir tous les enjeux de pouvoir qui mobilisent une bonne part des énergies dans le secteur associatif ? Je pense qu'il faut être conscient du danger qu'il y aurait à développer le mythe des vilains politiques avides de pouvoir et avides de manipuler les cerveaux des gens et des bons associatifs qui travaillent généreusement dans le sens de l'intérêt collectif. Mais depuis, j'ai un peu bougé par rapport à ce sujet de départ, qui était quand même plus un sujet de réaction et de colère, peut-être lié au score médiocre des élections présidentielles, et je voudrais, en fait, davantage répondre aux thèmes qui ont été suggérés pour

Agir localement, penser globalement: slogan mythique ou réalité opérationnelle?